LA PINÈDE
Au niveau du Guignol, une allée bordée d'une collection de bruyères s'incurve dans la pinède. Leur floraison rosée ou blanche s'échelonne tout au long de l'année. Il existe plus de 500 espèces de bruyères en Europe, dans le bassin méditerranéen, et en Afrique du Sud. Les espèces africaines provoquèrent au 19è siècle en Europe, un véritable engouement. Les amateurs, dont l'impératrice Joséphine, en constituèrent d'énormes collections. En 1900, un horticulteur de Vincennes en proposait encore plus de 300 cultivars
Centenaire, cette pinède de trois hectares était présente bien avant la création du parc. Les allées sont ici recouvertes de branches broyées, issues du recyclage des déchets verts du parc. Depuis décembre 2012, le Parc floral de Paris, s'est vu décerner le label national EcoJardin, référence de la gestion écologique des espaces verts. Ce label encourage l'adoption de pratiques de gestion respectueuses de l'environnement, valorise le travail des jardiniers gestionnaires des espaces verts et sensibilise les usagers aux problématiques du développement durable ainsi qu'aux pratiques écologiques des espaces verts.
La gestion différenciée au Parc floral porte sur l'économie d'arrosage, le traitement des déchets verts, l'abandon des traitements phytosanitaire et un plan d'action concernant les strates arborées et arbustives. Par ailleurs le tri sélectif des déchets des usagers est effectué.
ARBRES ET ARBUSTES D'AILLEURS
Le tronc ramifié blanc éclatant d'un magnifique bouleau de l'Himalaya (Betula utilis 'Jacquemontii') borde une allée, que nous empruntons. Plus loin, sur la gauche, découvrons un tronc rectiligne, lisse, zébré de vert et de grandes feuilles élégantes, aux lobes inégaux, portées par d'interminables pétioles : le sterculia à feuilles de platane (Firmiana simplex), une essence rare à Paris. Il fut introduit en France vers 1750 sous forme de graines envoyées de Pékin par le Père d'Incarville.
Au-delà d'un magnolia du Japon à grandes feuilles (Magnolia hypoleuca) , aux jolis fruits roses à l'automne, tournons à droite. Nous longeons un groupe d'érables palmés (Acer palmatum ‘Osakazuki') au feuillage automnal rouge superbe.
Au niveau de la bifurcation continuons le chemin vers la droite puis empruntons à gauche l'allée, deux arbustes d'espèces différentes portant le même nom français s'y succèdent. Le néflier du Japon ou bibacier (Eriobotrya japonica), originaire de Chine centrale, fut découvert au Japon, où il était cultivé. Ses grosses baies jaune orangé et duveteuses contiennent une pulpe délicieuse. Elles ne mûrissent qu'en avril-juin, la floraison ayant eu lieu en septembre-décembre de l'année précédente. En dehors de son aire originelle il est cultivé dans des régions clémentes, sud de la France, Italie, Turquie, Liban, Inde …
Quant à l'aire originelle du néflier commun (Mespilus germanica), elle s'étend de la Grèce à la région du Caucase et à l'Iran. Mais, répandu par la culture depuis les temps les plus anciens, il est devenu, dans toute l'Europe centrale, une espèce quasi spontanée. Son fruit en forme de toupie a une pulpe, à sa récolte, en octobre, très acerbe. Il faut le laisser « blettir » sur un lit de paille, dans un endroit sec et aéré, de trois semaines à deux mois : la pulpe devient alors molle et sucrée.
LES PINS
La contemplation des troncs droits démesurés des pins noirs (Pinus nigra) donne le vertige. Ils sont représentés par trois sous-espèces : 'Laricio', 'Austriaca' et 'Salzmanii'. Le pin laricio, originaire de Corse, domine ici. Une autre espèce, le pin sylvestre (Pinus sylvestris) se reconnaît à l'écorce rouge de la partie supérieure du tronc. Ses bourgeons sont utilisés pour le traitement des bronchites. Nous rencontrerons peut-être l'écureuil roux (Sciurus vulgaris) qui, dans la pinède, rogne les écailles de pommes de pins pour en extirper les graines dont il raffole. Il cueille les extrémités des rameaux de conifères, qu'il laisse tomber à terre après avoir croqué leurs délicieux bourgeons. Le nid, en forme de boule et chaudement garni de mousse et de lanières d'écorce, est construit de branchettes et placé haut dans les arbres.
LE SOUS BOIS
Au début du printemps, la pinède s'illumine des couleurs éclatantes des rhododendrons, plantes qui apprécient les sols acidifiés par les aiguilles de pin. Rhododendron vient d'un mot grec qui signifie "arbre des roses".
Un cortège de plantes acidophiles les accompagne : andromèdes, aux feuilles juvéniles roses, skimmias, aux fruits rouge vif, astilbes aux inflorescences plumeuses (collection nationale), fougères rustiques vert tendre (collection agréée), hostas aux larges feuilles, si prisées par les escargots. Parmi ceux-ci, deux espèces rayées jaune et brun dont la livrée est fort variable : l'escargot des bois (Cepaea nemoralis), avec le bord de la coquille sombre, et l'escargot des jardins (Cepaea hortensis) au bord généralement clair. Une curiosité : un escargot velu (Trichia hispida) dont la coquille brun pâle est, chez les jeunes sujets, garnie de poils courts et recourbés...
Au sol grouille une autre faune : le mille-pattes de Gabriel (Himantarium gabrielis), qui mesure jusqu'à 20 cm de long, y trottine de ses 266 à 346 pattes (c'est le myriapode d'Europe au plus grand nombre de pattes !). La pisaure (Pisaura mirabilis), grande araignée gris brun, chasse dans la végétation basse. Le mâle offre une proie en "cadeau de mariage" à la première femelle qu'il rencontre. L'accouplement dure au moins une heure, pendant que la femelle se nourrit de la proie. Ce stratagème évite au mâle d'être dévoré par sa belle. En hiver, à la tombée du jour, après s'être gavés de glands dans la chênaie, une colonie de milliers de pigeons ramiers (Columba palumbus), également connus sous le nom de palombes, envahissent le sommet des pins. C'est le site paisible qu'ils ont choisi pour établir leur dortoir hivernal. Dormir en groupe est un gage de sécurité !
ARBRE À RECORD
Près des pelouses qui séparent la pinède de l’aire de jeu, continuons à longer la grille pour admirer les deux séquoias géants (Sequoiadendron giganteum), aux écailles pointues disposées en spirale le long du rameau. Malgré son nom, il ne détient pas le record de hauteur, mais celui du volume. Le « général Sherman », dans le Sequoia National Park en Californie, mesure 83,8 m de haut, mais 31,3m de circonférence, avec un volume de 1 486 m3, ce qui fait de lui le plus grand arbre du monde en volume. Certains individus actuellement en vie dépasseraient l’âge de 3000 ans.
TONDEUSES NATURELLES
Plus loin, un enclos accueille périodiquement des moutons d’Ouessant. Ces tondeuses naturelles en broutant entretiennent les pelouses de manière écologique. L’éco pâturage permet de réduire les déchets verts liés à la tonte, d’assurer une fertilisation naturelle des sols et de favoriser la biodiversité. Le pâturage facilite le maintien et le développement d’une flore spécifique des pelouses, propice à l’épanouissement d’insectes tels que des papillons et d’éviter le développement excessif de certaines plantes. C’est toute la chaîne alimentaire qui bénéficie de cette diversité.
Les moutons sont parqués dans un enclos arboré de fruitiers, délimité par des haies fruitières, et équipé d’un abri et d’un abreuvoir. La prairie naturelle est constituée de plantes indigènes variées. 3 à 6 bêtes sont nécessaires pour l’entretien d’une surface de 1000 à 5000 m² pour une période de 3 fois 15 jours.
Entre deux périodes d’éco pâturage et lorsque la végétation est insuffisante, les moutons sont hébergés à la Ferme de Paris.
La présence de ces “tondeuses naturelles” invite à porter un autre regard sur l’environnement urbain.
D’autres lieux dans Paris sont gérés de cette façon. L’éco-pâturage permet d’entretenir de manière écologique les espaces verts, sans utilisation d’engins mécaniques qui uniformise le couvert végétal et entraîne un appauvrissement en espèces végétales et animales. Cette pratique est une alternative aux désherbants qui polluent les sols et permet de réduire le bilan carbone. Elle fait appel à des races rustiques d’herbivores en raison de leur résistance naturelle au climat, aux maladies, à leur adaptabilité à la ressource alimentaire. Revenons sur nos pas. A la bifurcation tournons à gauche et dirigeons-nous vers la petite pinède.